Bienvenue à toi

Bienvenue à toi

Hippocampe (Extrait)

Leur maison était l’archétype même des habitations
irlandaises. Bâtie de plain-pied, elle était composée d’un
soubassement en pierres apparentes et d’une façade couleur «
bouton d’or passé » qui finissait sur une véranda luxuriante,
ornée essentiellement de plantes exotiques. Un toit en ardoise
moussue chapeautait le tout !
Le taxi était parti et Chloé et François étaient restés là, plantés
comme deux piquets avec leurs valises. Ils attendaient devant
la maison que quelqu’un vienne enfin à leur rencontre.
Soudain la porte s’ouvrit violemment et ils virent arriver une
rousse comme on n’en fait certainement que dans ce pays.
C’était Abigaïl, qui trottinait vers eux, le sourire aux lèvres en
signe de bienvenue.
Son visage, c’était la voie lactée ! Entaché de centaines d’étoiles
brunes, naines, il respirait l’éternité. Certainement un
astronome aurait pu facilement trouver avec un peu
d’imagination une constellation, comme on devine des images
sur les taches de "Rorcha".
Deux grandes planètes bleues y étaient enchâssées dans une
harmonique symétrie.
Cette créature céleste portait des vêtements d'un "autre
monde", un monde où la mode devait être certainement
bannie depuis longtemps. Plus "kitch" que ça, tu meurs !
Chloé eut le sentiment qu’Abigaïl s’était déguisée à l'instar
d’un enfant qui joue aux "Indiens". Elle avait revêtu pour les
parents de Louise, son habit "Irlandaise de choc" !
Elle était petite, un poil « ronde », une chevelure léonine rousse
enflammée, enveloppée dans un pantalon golf à carreaux, qui
la faisait ressembler à un kaléidoscope vivant !
Les présentations s’étaient déroulées dans la bonne humeur
communicative de la maîtresse de maison.
– Entrez, je vous en prie !
Dit-elle, essoufflée.


Alan leur avait préparé une sorte de ragoût guère appétissant,
mais ils n’attendaient qu’à voir !
Midi allait sonner, et tout allait mieux que dans le meilleur des
mondes !
Le repas était parfait. Chloé et François avaient bien
sympathisé avec la famille. Louise en revanche, n'arrêtait pas
d'embêter gentiment Allistair. Ils se chamaillaient à n'en plus
finir comme des gamins. L'adolescente était pervertie par
l'ascendant qu'elle avait sur lui, de par son âge et d'autre part
par l'indéniable maturité des filles sur les garçons.
À un moment, Allistair se ferma complètement en boudant.
C'était en fait le but recherché par Louise.
François avait de plus en plus de mal à suivre la conversation !
Encore heureux pour lui, qu’ils parlaient le français
parfaitement ! Les quatre adultes passaient allègrement de
l'image de Nicolas Sarkozy en Irlande, à la désertification des
pâturages à cause de l'élevage intensif des moutons et cætera et
cætera !!
François était obnubilé par le comportement de sa fille. Chloé
et les parents d'Allistair étaient tellement pris dans des
algarades verbales à bâtons rompus qu’ils n’avaient pas
remarqués, que François ne parlait plus ! Chacun et chacune
creusaient son esprit pour paraître le plus intéressant et le plus
drôle possible.
Le mutisme de François était effrayant. Celui-ci se détourna
vers Louise avec un regard disproportionné de haine et lui dit
violemment :
– Bon, Louise ! Ça suffit, d'accord ?
– Mais papa on s'amuse
– Ce n'est pas grave François !
Dit Chloé avec une voix chancelante.
– Toi tu te tais ! Compris ! Tu n'as rien à dire ! Je ne crois
pas qu'Allistair apprécie tellement être harcelé par ta fille, lui !
En retour du mari, la mâchoire serrée.
– Il est trop "mignon" quand il boude ! dit Louise pour
arrondir les angles.
François souligna d'un rire réprimé le mot "mignon" en fixant
sa fille durement. Il posa sa serviette en boule sur la table se
leva d'un trait et se dirigea vers l'espace vert de la maison, la
véranda.
– Tout le monde est contre moi ici, je me casse !
Cette saute d'humeur jeta un froid sensible jusqu'au bout des
pieds de Chloé.
– Papa, excuse moi, reviens ?
– Ton père est comme ça, dit Chloé toute penaude ; Tu sais
qu'il est impulsif sur certaines choses, ne le provoque pas !
C'est un trait de son caractère qui malheureusement ne fait
qu'empirer. Laisse-le, il reviendra tout seul.
– Toi tu ne l'as pas provoqué et pourtant tu as vu comme il
t'a traité ? lui répondit la fille à sa mère, du tac au tac.
– Oui, je sais !



30/10/2012
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